Coups de coeur

Dans une petite chambre de bonne du 18 ème arrondissement de Paris, Roukiata que l’on appelle petit modèle en Afrique, fait son sac, elle rentre chez elle au Burkina Faso. Elle veut faire plaisir à toute sa famille sans se ruiner. Ses cousines s’arracheront les vêtements de chez Tati made in France et sa mère sera ravie du grille-pain avec ramasse miettes. Roukiata nous raconte sa folle jeunesse (elle avait les mêmes préoccupations que toutes les adolescentes du monde et elle défiait la rigueur de son père), sa vie actuelle et sa vie parisienne. L’hexagone est la référence absolue en matière de mode et de culture. On découvre qu’elle est étrangère en France et devient étrangère dans son pays natal. Cette bande dessinée nous propose une succession d’anecdotes autour de cette jeune fille, c’est drôle et léger. C’est un hymne à l’enfance, la famille, l’amitié et la différence. C.P.

Un titre qui cristallise à lui seul l’unique objet de ce premier roman, très remarqué lors de la rentrée littéraire de l’automne 2021.

Au premier abord, nous pourrions aisément associer la narratrice à une certaine Bree van de Kamp de la série Desperate Housewives à la différence près qu’elle arbore une chevelure au blond très travaillé et offre l’image de la femme parfaite. Cette belle femme est parvenue à prendre l’ascenseur social en devenant professeure d’anglais et traductrice. Elle réside dans un bel appartement situé dans un quartier parisien cossu, est mère de deux jeunes et beaux enfants et surtout forme un couple idéal avec son mari. Elle est amoureuse comme au premier jour après 15 ans de vie commune. Oui mais…

au fil des pages, un hic à ce bonheur affiché se distille peu à peu : l’exclusivité obsessionnelle et maladive que l’héroïne consacre à l’homme de sa vie, quitte à s’éloigner de son entourage social, à mettre ses enfants au second plan, à ne faire travailler ses élèves que sur des traductions de romans d’amour. L’intégralité de son quotidien est en effet rythmée par le comportement de son mari, passé au crible, évalué, projeté en permanence.

L’auteur, Maud Ventura, bien connue pour son podcast Lalala dédié à l'amour et ses corollaires (rupture, désir, jalousie…) s’amuse ici avec brio à décortiquer tous les signes de la passion, de la jalousie à la dépendance, au sentiment de désamour.

En empruntant la forme d’un journal intime, et usant d’un ton féroce, incisif, avec un sens aigu de l’observation non dépourvu d’humour, l’auteur intrigue, bouscule parfois, interroge sur la psyché amoureuse. Elle happe son lecteur dès le début, le tient en haleine pour mieux lui réserver une belle surprise à la fin du récit. Brillant. SMR

On ne ressort pas indemne de cette incroyable plongée dans le quotidien d’une juge antiterroriste. Un récit magnifiquement porté par la plume de Karine Tuil, qui plonge le lecteur en position immersive en plein cœur des dilemmes auxquels sont confronté les juges d’instruction antiterroriste. Alma, détient entre ses mains le sort d'un jeune musulman parti en Syrie. A-t-il été embrigadé par l’État islamique ou est-il allé faire de l'humanitaire pour aider le peuple Syrien comme il s'en défend ? Femme et mère de famille, Alma est tiraillée entre les discours de son entourage et son intuition. Elle sait que ses choix risquent de bouleverser sa vie et celle du pays, mais comment être certaine de prendre la bonne décision? En plus d’être dévorée par le poids de la responsabilité et la douleur des familles de victimes, son couple est en pleine explosion. La liaison qu’elle entretient est d’autant plus embarrassante, qu’elle concerne l'avocat de l'accusé. Les personnages de ce roman, sont inscrits dans la réalité et le récit est rythmé par des extraits d’interrogatoires de la juge. Face à ces combattants endoctrinés et plein de haine, il faut pourtant garder le lien, questionner pour comprendre et essayer de garder espoir. Un roman déstabilisant qui laisse une trace. C.A.

En 2016, la France essaye toujours de se relever des attentats survenus en 2015 à Paris et à St Denis. Alma Revel, a un métier particulier, que peu de personnes connaissent vraiment mais qui tient un rôle majeur dans notre société. Alma est juge d’instruction antiterroriste. Elle doit se prononcer sur le sort d’un jeune homme suspecté d’être parti rejoindre l’Etat Islamique en Syrie. Comme le titre du roman l’indique, Alma doit prendre et faire face à La décision. Comment le choix d’une seule personne va se retrouver ou non sur le devant de la scène médiatique et politique, devant la vindicte populaire ?

En parallèle de ce métier si prenant, Alma doute sur son mariage. Doit-elle divorcer ou replonger dans une relation fusionnelle avec un homme qu’elle côtoie dans des affaires si sensibles ?

Encore une fois, le style de Karine Tuil fait mouche. Alma est un personnage fort qui rend hommage à ce métier si méconnu qu’est le juge d’instruction antiterroriste. C’est également un très beau portrait de femme. Tout au long de ce roman prenant, puissant, une question se pose : Et vous, quelle décision auriez-vous prise ?   S.T.

1870, Jim Lockheart pense que l'homme qu'il traque depuis des années se trouve à New Hope. Sauf qu'avant de se venger, Jim va se retrouver décontenancé par les habitants de cette ville du Nord pas comme les autres. En effet, il va rencontrer Ellen, la shérif de New Hope qui n'a peur de rien ni de personne et Louis, ancien esclave, barman du saloon. C'est par ces deux personnages, que petit à petit, vont s'effriter les préjugés racistes et antiféministes sudistes de Jim. Jim va-t-il toujours vouloir se venger ?

A travers les flashbacks, on comprend vite comment tout ce petit monde va se retrouver à New Hope. Un très bon western, avec des duels poussiéreux, des gorgées de whisky, mais pas que. Philippe Arnaud décrit une Amérique encore profondément meurtrie par la guerre de Sécession, les massacres Indiens et l'esclavagisme.

Coup de cœur pour Ellen la shérif !!!  S.T.

Califat d'Al Andalus, Espagne. Année 976. La culture à Cordoue est à son apogée dirigée par al-Hakam II. A la mort de ce dernier, l'un de ses vizirs, Amir, profite de l’occasion pour prendre le pouvoir. Gonflé d’ambition, il va faire brûler les quelques 400 000 livres de la bibliothèque de Cordoue mais c’est sans compter sur Tarid l’eunuque bibliothécaire accompagné de Lubna, une jeune copiste noire, et de Marwan, son ancien apprenti devenu voleur. La fine équipe va essayer de sauver des livres essentiels de cette bibliothèque sur une « bibliomule » qui n’en fait qu’à sa tête ! L’aventure commence ....

Pour découvrir l’auteur Lupano dans une B.D. très différente Des vieux fourneaux.

C'est beau, c'est drôle et c'est surtout une ode aux bibliothèques, aux savoirs et à la connaissance...

Une B.D. à la portée universelle, un bijou aux temps des Omeyyades et d'Al Andalus. A.C.

Pour son premier roman et après plusieurs romans policiers, l’auteur corse fait une entrée remarquée en littérature blanche. Dans ce roman choral situé dans un Sud imaginaire, le baron Delezio fête avec tout le village la fin d’étude de son fils Raffaele. Un drame survient et la vie de plusieurs personnages va basculer.

Dans ce court roman très bien mené, il est question de classe sociale, de secrets de famille mais aussi de filiation et d’histoires d’amour contrariées.

Un roman qui vous fera vibrer ! A.C.

L'auteur, leader du groupe Dionysos, raconte l'enfance de son père le petit Mainou. En Juin 1944 ce petit garçon âgé de 9 ans vient de perdre sa mère morte en couches et son père doit repartir au combat. Il l’envoie chez sa grand -mère dans une ferme en Lorraine accompagné d'une boîte en bois renfermant les secrets de la famille Malzieu. Ce sont les derniers mois de la guerre vus à la hauteur d'enfant que Mathias Malzieu fait revivre en mêlant sa voix à celle de son père. Mainou va rencontrer cette famille qu'il ne connaît pas encore, découvrir avec son oncle Emile le pouvoir de l'imagination, trouver la force de faire son deuil et survivre dans une France occupée. Dans la boîte à secrets il trouve des bobines de film super 8, un chalutier or et bleu, un album photos et deux lettres de la seconde guerre mondiale. Il sera difficile à Mathias Malzieu de parler de cette époque avec son père mais un jour il rompt ce silence et se confie à son fils.  C'est une histoire intime et bouleversante alliant humour et poésie que Mathias Malzieu nous confie dans un style poétique et enfantin. C’est un roman que l'on apprécie avec des personnages plus attachants les uns que les autres et l'amour est toujours gagnant !  C.P.